samedi 24 septembre 2016

Les blasons de la mythologie et de l'histoire antique #08 : les Amazones, 1ère partie

Suite de la série consacrée aux personnages de la mythologie : grecque, romaine, moyen-orientale, asiatique, etc... ainsi qu'aux acteurs ou héros de l'Histoire antique et du haut Moyen-Âge (période antérieure à l'an 1000) auxquels ont été attribué des armoiries dans les manuscrits ou armoriaux médiévaux et renaissance. Revoir l'épisode précédent  → ICI

Le Blason des Armoiries par Hiérosme / Jérôme de Bara (extrait) -  édition : Barthelemi Vincent, 1581 - page 154
Google Books (https ://books.google.fr/)

• TOMYRIS :
- blason selon Jérôme de Bara : "De sinople à un lion sans vilénie d'argent, couronné de laurier d'or, à une bordure crénelée d'or et de gueules, chargée de huit tiercefeuilles à queue d'argent".

♦ Bara nous donne une caractéristique étonnante dans son blasonnement : "un lion sans vilénie"... ?
En français courant, cela veut dire que l'animal n'a pas de sexe (mâle) visible, comme c'est très souvent le cas avec les animaux héraldiques pour symboliser la virilité du propriétaire des armoiries. Mais dans notre cas, c'est logique qu'il n'en possède pas, puisque notre héroïne guerrière est une femme ...
♦ Pour être exact, l'auteur aurait dû par contre préciser : " ...à une bordure de gueules et... un orle crénelé d'or".

"La reine Tomyris se faisant apporter la tête de Cyrus"
 tableau de Mattia Preti (1670/72) - collection privée
Tomyris est une reine légendaire des Massagètes, célèbre pour avoir mis fin au règne de Cyrus le Grand, roi Achéménide et fondateur de l’Empire perse. Elle est considérée comme la dernière reine des Amazones.

○ Les Amazones, dans la mythologie grecque, sont un peuple de femmes guerrières.

• Dans le peuple des Amazones, qui ne reconnaissent que la filiation matriarcale, seules gouvernent les femmes. Si, dans certains récits, des hommes sont tolérés près d’elles, ce sont des serviteurs. Les Amazones ont toutefois quelques relations avec le sexe opposé, pour avoir des enfants. On raconte généralement que, dans ce but, elles attaquent une fois par an les peuples voisins pour y trouver des hommes, avec lesquelles elles s’accouplent uniquement la nuit. Des naissances, elles ne gardent que les filles,  les garçons sont renvoyés ou tués, ou encore mutilés et rendus aveugles. Les Amazones manipulent l'arc, aussi se brûlent-elles le sein droit pour faciliter cet exercice (« amazones » signifie en grec « celles qui n’ont pas de sein »). Elles révèrent la déesse de la chasse Artémis, guerrière et chasseresse comme elles ; selon la légende, ce sont elles qui ont instauré son culte.

combat d'Hercule contre les Amazones,  peinture sur un vase grec

Le Blason des Armoiries par Hiérosme / Jérôme de Bara (extrait) -  édition : Barthelemi Vincent, 1581 - page 156
Google Books (https ://books.google.fr/)

MARTHESIA ou MARPESIA :
- blason selon Jérôme de Bara : "De pourpre à un griffon d'argent, couronné de feuilles de gramen d'or, membré et armé de même".

♦ l'artiste qui a colorié les blasons a semble-t-il exagéré la couverture du jaune (or) sur le griffon !  la partie inférieure du corps est totalement peinte de jaune, au lieu des extrémités seulement, et le bec et la langue également, alors que cela n'est pas explicité par le blasonnement : "armé et membré" ne concerne que les membres du griffon.
♦ à noter le terme ancien de "gramen" qui désignait l'herbe, la graminée des prés.

• Dans la mythologie grecque, Marpésia (en grec ancien Μαρπησία, « voleur », parfois orthographié Marthésia de façon erronée) est une reine des Amazones chez les Goths mentionnée dans l'historiographie latine. Les femmes Goths prirent les armes sous les ordres de Marpésia et de sa sœur Lampédo afin de se défendre contre un peuple voisin envahisseur.
 Dans son ouvrage l’Histoire des Goths, Jordanès rapporte que Marpésia s'est mise à la tête d'une armée de femmes et les conduit jusqu'aux montagnes du Caucase où elle fonde une cité (actuelle Derbent). Son nom est donné au lieu où elle s'est arrêtée : le « rocher de Marpésia » ou « roc marpésien ». Alexandre le Grand appellera cet endroit les « portes Caspiennes ».
  Marpésia est une des Amazones ayant participé à la fondation de la cité d'Éphèse où elle fait élever un temple à Artémis, la déesse de la Chasse.
  Marpésia et sa sœur Lampédo étendent leur influence jusqu'en Europe et en Asie Mineure. Ses filles Orithye et Antiope lui succèdent lorsqu'elle est tuée lors d'une bataille menée contre l'invasion de barbares venus d'Asie.


Marthésia et Lampedo, Amaz•R• (reines des Amazones) - médaillons issus du livre iconographique "Promptuarii Iconum Insigniorum...."  de Guillaume Rouillé  publié à Lyon en 1553.
 
LAMPEDO ou LEMPHETO :
- blason selon Jérôme de Bara : "Parti, le premier de sable à trois têtes de femmes ornées et  couronnées à l'antique d'or, à la bordure de même, le deuxième d'azur à trois fasces ondées d'or".

Lampédo (en grec ancien « torche enflammée »), nommée également Lampéto est une reine Amazone mentionnée dans l'historiographie latine. Elle régna avec sa sœur Marpésia. Les sœurs se disaient filles d'Arès (Mars) afin de terrifier leurs ennemis. 
  Son nom se réfère aux processions aux flambeaux se déroulant traditionnellement à la nouvelle lune en l'honneur d'Artémis, déesse de la chasse.

 ♦ nous sommes dans l'héraldique imaginaire, et donc des variations sont inévitables d'un auteur à un autre, d'un pays à un autre , comme on peut le vérifier ci-dessous. Toutefois les trois têtes de femmes restent la constante, dans des configurations diverses.

Regina (reine) Lampheto, en version germanique -  une des Neuf Preuses
extrait du manuscrit "Sammelband mehrerer wappenbücher"
 BSB Cod. Icon 391 (Augsburg - Bavière - vers 1530) 
autre blason de Lampeto, considérée comme une des
des Neuf  Preuses, détail de la fresque des Neuf  Preuses
du château de Manta (province de Cuneo, Piémont, en Italie)
-voir plus bas : la fresque complète-
Lampheto, une des Neuf Preuses - fragment
d'une enluminure ornant le folio 125v. du manuscrit
de Thomas de Saluces : "Le Chevalier errant" (1394)
cote :  Français 12559 - BNF Paris





Le Blason des Armoiries par Hiérosme / Jérôme de Bara - page 124 (fragment)  -  édition : Rolet  Boutonné, 1628 - Google Books (books.google.fr/)


OTHRERA ou ORYTHIA :
- blason selon Jérôme de Bara : "D'azur à un cygne d'argent, membré de gueules : au canton droit un écusson de sable à trois têtes de femmes, ornées et couronnées à l'antique d'or et bordé de même".

♦ il semble que l'auteur a fait une confusion avec les noms des différentes et nombreuses reines des Amazones : ici il pense, à tort, qu'Othrera (Otréré) et Orythia (Orythie) seraient le même personnage.
♦ Bara, dans son blasonnement, ne dit pas que le cygne est "becqué ... de gueules". Il semble probable que les couleurs ont été rajoutées plus tard sur le dessin, après l'impression du livre, et le bec a été peint (à tort ?) en rouge ! Ou bien, c'est Bara qui a oublié cette précision dans la légende de son dessin...

• Dans la mythologie grecque, Otréré (en grec ancien Ὀτρηρή / Otrêrế, littéralement « rapide, agile ») est une reine des Amazones. D'une liaison avec Arès, elle a, selon les auteurs, engendré Penthésilée et/ou Hippolyte. Selon une autre source, au contraire, elle est elle-même fille d'Arès. L'auteur latin Hygin en fait la fondatrice du temple d'Artémis à Éphèse.

• Orithye ou Orithya (« La femme redoutable dans la montagne ») était, selon la mythologie grecque et la mythologie romaine, la fille de Marpésia. Après le décès de sa mère, Orithye devint la nouvelle reine des Amazones. Elle co-régna avec Antiope, citée parfois comme étant sa sœur. Ses techniques de guerre furent exceptionnelles et amenèrent beaucoup d'honneurs à l'empire Amazone.


♦ Vous le découvrez avec Lampétho (à droite), notre histoire des reines Amazones de la mythologie grecque croise ici le chemin d'une autre légende écrite celle-ci plus tard, au Moyen-Âge, en Occident qui s'inspire largement de la première, du moins au début, basée sur l'épopée des héroïnes guerrières de l'Antiquité : la légende des Neuf Preuses. C'est d'ailleurs une chose assez remarquable pour cette époque où le statut de la femme la mettait rarement à l'avant de la scène, hormis de celui du rôle d'épouse, d'amante, de mère, de ménagère et de bonne chrétienne. Mais c'est tout de même un idéal clairement masculin, celui de la chevalerie, qui se trouve transposé dans le corps des femmes !
• C'est à la fin du XIVe siècle, sous la plume du procureur au parlement de Paris, Jean Le Fèvre, qu'apparaissent les Neuf Preuses, dans son ouvrage "Le Livre de Lëesce", véritable défense et illustration des femmes, modèles de vertu, de vaillance et de courage. Toutes sont issues de la mythologie de l'Antiquité païenne. Elles sont toutes reines. Selon les pays, car l'histoire des Neuf Preuses connaît un grand succès à travers l'Europe, la liste se modifie, contrairement à celle des Neuf Preux, qui elle reste fixe. Pour mémoire, les Neufs Preux sont trois héros païens : Hector, Alexandre le Grand et Jules César, trois héros juifs : Josué, David et Judas Macchabée, trois héros chrétiens : le roi Arthur, Charlemagne et Godefroy de Bouillon.
• Les Neuf Preuses figurent aussi dans "Le Jouvencel", récit à clef du siège d’Orléans par Jean V de Bueil qui combattit aux côtés de Jeanne d'Arc. La liste des Preuses varie d'un auteur à l'autre et ne suit pas toujours la division tripartite Païens / Juifs / Chrétiens. Au départ ce sont des héroïnes mythologiques, inspirées du "De claris mulieribus" de Boccace. Thomas de Saluces, par exemple, en donne la liste suivante: Deiphile, Sinope, Hippolyte, Ménélope, Sémiramis, Lampétho, Thamaris, Theuca, Penthésilée. La plupart sont des reines Amazones ou apparentées. Par ailleurs, en Allemagne, une série de bois gravés de Hans Burgkmair met en scène pour figurer les Neuf Preuses,  trois héroïnes Romaines : Lucrèce, Veturia, Verginia ; trois héroïnes de l’Ancien Testament: Esther, Judith et Yaël ; trois héroïnes chrétiennes : sainte Hélène, sainte Brigitte de Suède et sainte Élisabeth de Hongrie. J'y reviendrai sûrement un jour, car on leur a toutes donné des armoiries ! ....

la magnifique fresque des Neuf Preuses de la salle baronniale du château de Manta, près de Saluces (Saluzzo en italien) dans le Piémont, en Italie. Elle est incomplète à droite où la dernière Preuse est malheureusement coupée à la moitié du corps.
Leurs costumes sont à la mode du XVe siècle et au-dessus de chacune à gauche est accroché l'écu de leurs armoiries respectives, du moins pour sept d'entre elles : de gauche à droite : Deiphile, Sinope, Hippolyte, Menelope, Sémiramis, Lampétho, Thamaris, Theuca (son blason a été oublié dans le montage de la photo, mais il existe) et Penthésilée (incomplète)
Château de Manta (Piémont, Italie) - à gauche : extérieur et à droite : la salle ornée des peintures murales, œuvres du
  "Maestro del Castello della Manta" (on ne connait pas son nom) au XVe siècle (cliquer sur les photos pour les agrandir au maximum)



sources textuelles : encycl. Encarta Microsoft Corporation et fr.wikipedia.org


A bientôt pour la suite des Amazones : → ICI



            heraldos  dicos







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